Atelier Lacourière & Frélaut

Tafel n°9
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Diese Texte sind nur auf Französisch, wir bitten um Entschuldigung.

Hommages Dans « Les Nouvelles de l'Estampe » n°5 de 1967, Mme Françoise Voimant, conservateur au Cabinet des Estampes, publiait un hommage à Roger Lacourière, disparu l'année précédente.
« Pour mieux faire comprendre le rôle joué par Roger Lacourière, écrit-elle, nous avons préféré donner la parole à ceux qui l'ont bien connu et aimé, des artistes de tendances et de générations différentes, Miro, Segonzac, Soulages, ou encore le poète éditeur Iliazd. Les trois premiers nous ont aussitôt envoyé des témoignages émouvants et spontanés. Un peu plus tard, nous recevions d'Iliazd un merveilleux poème, chef-d'oeuvre de précision et de délicatesse où nous voyons revivre dans son atelier « Rogelio Lacourière, pêcheur de cuivre . . . ».
Nous reproduisons ici les témoignages des trois artistes ainsi que les premiers vers du poème d'Iliazd.

Légende photo 1. Joan Miro et Roger Lacourière, photographiés par Madame Lacourière. Voici le témoignage écrit par Miro le 22 octobre 1966 : « J'ai gravé mon premier cuivre chez Roger Lacourière, il y a déjà fort longtemps. Cette gravure sur un sujet mythologique, un berger jouant de la flûte et une chèvre dressée sur un rocher mangeant la feuille d'un arbre, me fut commandée par Tériade vers 1925. C'est avec timidité que j'ai attaqué le vernis de la planche. Ce vernis, au fur et à mesure qu'il disparaissait par l'incision de la pointe, laissait le cuivre à découvert. L'étincellement qu'il provoquait sur le métal en blessant mes yeux m'intimidait encore davantage. C'est Roger Lacourière qui, avec ses conseils, m'a donné le courage et m'a enseigné la technique, en me laissant prévoir toutes les possibilités et richesses qu'il y avait.
Je n'ai cessé depuis de me passionner pour la gravure, les acides diaboliques se prêtent à tant d'aventures !
Je garde toujours chez moi, à une place d'honneur, une estampe qu'il m'offrit, magistralement gravée de sa main, reproduction de ce tableau si plein de poésie, « La Charmeuse de serpents » de Rousseau.
Devant le Sacré-Coeur, en sortant du funiculaire et devant cette féerique vue de Paris, enveloppée par ce voile de lumière qui se marie avec le noir velouté des encres sur une planche. C'est de tout coeur que je rends hommage à la mémoire de Roger Lacourière, le premier qui mit en mes mains la surface envoûtante d'un cuivre et les outils pour tenter cette aventure de défi et d'amour. »
2. Joan Miro et Roger Lacourière examinant une épreuve pour « A toute épreuve » de Paul Eluard. « Fantôme de ta nudité / Fantôme enfant de ta simplicité / Dompteur puéril sommeil charnel / De libertés imaginaires. ». L'ouvrage a été édité par Gérald Cramer (Genève) et achevé d'imprimer à Paris le vingt-cinq mars mil neuf cent cinquante-huit sur les presses de Fequet et Baudier pour le texte et de l'Atelier Lacourière et Frélaut pour les gravures sur bois. 3. Gravure « Hommage à Lacourière » de Joan Miro, éditée par Iliazd. Eau-forte et aquatinte de 1968 (Cramer n°120, Dupin II n°456) 4. Dunoyer de Segonzac discute un détail d'impression avec Jacques Frélaut, alors le principal collaborateur de Roger Lacourière. 5. Dunoyer de Segonzac a gravé les illustrations de nombreux livres avec l'Atelier Lacourière et Frélaut : « Les Géorgiques » de Virgile en 1947 avec 120 planches à l'eau-forte (Ed. au dépens de l'artiste), « Le lierre » de Pierre Brisson en 1953 avec 28 planches à l'eau-forte (Ed. André Sauret), « Quelques sonnets » de Pierre de Ronsard en 1955 avec 51 planches à l'eau-forte (Ed. chez l'artiste). Voici la retranscription de la lettre qu'il écrivit le 3 octobre 1966 : « Roger Lacourière, qui vient de disparaître, a imprimé depuis trente ans les livres édités par Ambroise Vollard, illustrés par Picasso, Derain, Rouault, Chagall . . . Il a mis son exceptionnel génie inventif au service de ces très grands talents.
Dans notre esthétique du XXème siècle, si violemment contrastée, on peut voir se coudoyer dans les ateliers de la rue Foyatier, un Soulages, un Bernard Buffet, un Zao Wou-Ki, un Michel Ciry ou un Pierre Trémois et bien d'autres peintres-graveurs. Ce qui caractérise la personnalité de Lacourière, ce sont ses recherches dans toutes les techniques d'art graphique. C'est lui qui, ayant à imprimer les bois en couleurs pour le «Pantagruel de Derain, a eu l'idée d'utiliser un seul bois alors qu'auparavant l'artiste devait graver un bois pour chacune des couleurs.
Dans le domaine de l'aquatinte et de la gravure au grain les recherches de l'imprimerie et les expériences de Lacourière et de Jacques Frélaut ont joué un rôle primordial dans l'évolution de la technique de cette forme de gravure si recherchée aujourd'hui.
A la personnalité de Lacourière, grand artisan de la gravure, se joignait l'esprit plein de fantaisie d'un gamin de Paris.
Grand ami des peintres-graveurs, ceux-ci travaillaient avec lui dans un esprit de complète camaraderie, et l'atelier de la rue Foyatier connaissait une atmosphère de cordialité qui est continuée par Jacques Frélaut et la jeune équipe d'imprimeurs qui l'entoure. »
6. Deux volumes in-folio pour « Les Géorgiques » de Virgile. Traduction de Michel de Marolles. Ouvrage publié Aux dépens de l’artiste contenant 119 eaux-fortes originales d’André Dunoyer de Segonzac (1884-1974) dont le tirage a été réalisée par l'Atelier Lacourière. Édition limitée à 250 exemplaires, tous sur papier vélin d’Arches. 7. Pierre Soulages réalise ses premières eaux-fortes à l’atelier Lacourière en 1952. Il est ici au travail avec Robert Frélaut, frère de Jacques. Voici le témoignage qu'il écrivit le 10 octobre 1966 : « C'est vers 1950 que je connus Roger Lacourière et qu'il me fit faire mes débuts de graveur. Ce qui de suite m'a frappé chez cet homme plein d'humour, de cocasserie et de coeur, c'est la liberté d'esprit qu'il avait devant son métier, ce métier où pourtant le poids et le respect du passé conduisent si souvent à une tradition sclérosée et académique. Tout ce qu'il était, son goût de la recherche et de l'aventure, sa fantaisie, ses distractions même, le portent à préférer ce qui dépasse le savoir et les recettes. C'est grâce à lui que j'ai aimé graver. »
Il disait : « Chaque artiste doit inventer son métier » mais aussi : « La gravure c'est comme le trapèze, on peut faire ce qu'on veut mais il ne faut jamais lâcher le trapèze. » Un jour où ma planche avait été oubliée dans l'acide et où, consterné, j'en contemplais les ravages inattendus : « Ne t'inquiètes pas » me dit-il, « tant qu'il y a du cuivre il y a de l'espoir. »
C'est ainsi qu'il m'a aidé à échapper aux contraintes, aux précautions paralysantes, à la minutie appliquée des débutants et des copistes.
Graver devint alors pour moi non plus la tentative de recréer un effet prémédité mais être attentif à ce que proposent, à ce qu'apportent l'action de l'acide sur le cuivre, les diverses manières d'encrer et d'imprimer. C'était choisir d'être informé par cette technique sur ce qu'on exprime et qui n'est pas dissociable des moyens d'expression. C'était collaborer avec la corrosion et ses hasards, se laisser surprendre par eux pour les infléchir, les pousser vers ce qu'ils ont suggéré et que l'on veut voir naître et que l'on a découvert dans le travail chemin faisant. »
8. Eau-forte I de Pierre Soulages. La toute première gravure de l'artiste a été réalisée, en 1952, au sein de l'Atelier Lacourière qui l'a éditée. Cette gravure, dont le tirage a été de 100 épreuves numérotées et signées, a été réalisée à partir de 3 cuivres.
9. Arrivé à Paris en 1921, Iliazd, de son vrai nom Ilia Zdanevitch, poète, historien d'art et merveilleux éditeur russe, écrira un magnifique poème, chef-d'oeuvre de précision et de délicatesse où nous voyons revivre dans son atelier « Rogelio Lacourière, pêcheur de cuivres ». Iliazd donnera, un an plus tard (en 1968), une version définitive de ce poème. Un ouvrage, comportant ce poème et un texte de Picasso, sera publié en 1968 par le « Degré 41 » à Paris (Iliazd) et illustré par André Beaudin, Camille Bryen, Derain, Dunoyer de Segonzac, Max Ernst, Alberto Giacometti, Alberto Magnelli, Marcoussis, André Masson, Joan Miró (voir n°3 du présent panneau), Pascin, Picasso et Survage.
Voici les premiers vers de ce poème, et les derniers :
Toujours on le voit penché vers le liquide trouble
scrutant la profondeur où murit la planche
invisible pour autrui
rien ne laisse deviner les risques
de son occupation.
. . . . . .
Lacourière parti
ils se sont dispersés
mais leur écho persiste
Lacourière Lacourière
toujours.
10. Carton de vernissage : « Hommage à Roger Lacourière. Iliazd a l'honneur de vous inviter à l'exposition éphémère des parchemins de son dernier livre, le vendredi 12 décembre 1969 de 18 à 20 heures à la Galerie Dina Vierny, 36, Rue Jacob Paris 6. »
11. Gravure d'Alberto Giacometti pour l'ouvrage « Hommage à Roger Lacourière » d'Iliazd.

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